dimanche 27 juillet 2014

Haikus de la nuit profonde (1)

Qui ne relèvent pas exclusivement de la situation des Chrétiens d'Orient.
Plutôt sur l'obsession globale d'une zone entre la Syrie et l'Irak qui voit depuis des siècles et des siècles ses frontières redessinées.

Ce que nous appelions le Levant à une époque.

Un très bel article de blog de Dominic Selwood prend pour exemple les Croisades, afin de nous montrer à quel point ces terres sont et furent disputées, et toujours témoins de la violence la plus extrême.

Avec deux Sig-Sauer
Le bandit de l'Euphrate
Charge sa ceinture

C'est que le roseau
Devient flûte dans sa plainte
Exilé des terres

Bandes armées éparses...
Flux d'argent ennemi
Ou ami qu'importe ?

Le blé n'a plus de terre
Redevenu sauvage
Il prie, se déplace

Dix heures pour fuir
A l'amertume le sel
Fait place en mangeant

Levant et Couchant
Nous ne savons plus quel terme
Plus de frontières  


lundi 19 août 2013

Qui a pu fermer autant d'oreilles ?

"Comme un fruit suspendu dans l’ombre du feuillage,
Mon destin s’est formé dans l’épaisseur des bois.
J’ai grandi, recouvert d’une chaleur sauvage,
Et le vent qui rompait le tissu de l’ombrage
Me découvrit le ciel pour la première fois.
Les faveurs de nos dieux m’ont touché dès l’enfance ;
Mes plus jeunes regards ont aimé les forêts,
Et mes plus jeunes pas ont suivi le silence
Qui m’entraînait bien loin dans l’ombre et les secrets."

Maurice de Guérin

samedi 17 août 2013

Remède à l'ennui

Avec toutes ces congrégations de l'ombre, qui drainent un peuple et se croient autorisées à pratiquer le mal sous les auspices du bien, nous ne sommes pas à l'aise. Qu'au détour d'un dîner, les conversations s'enchaînent en société sur des sujets neutres, familiaux, tribaux en filigrane ; des exemples nombreux tirés de la vie quotidienne. Cela, en revanche, nous laisse distraits.
Nous avons un penchant pour les figures religieuses et leurs bras suspendus, pris dans la trame des toiles de maîtres. Cependant, nous devinons la multitude qui, parfaitement immobile, résignée, travaille en silence et par la pensée à réduire son semblable au néant. Simplement, directement, patiemment, sans aucune notion du péché.

C'est avec ce constat, que chaque soir tu fais croire à ton mari que tu plonges à nouveau, avec délice, dans les vapeurs du vin rouge. De retour du bureau, il dénoue alors sa cravate, rassuré, te croyant occupée par l'une de tes anciennes passions de jeunesse : la boisson et seule.
En effet, si l'on croit vulgairement les hommes toujours près de perdre leur compagne, personne n'est en mesure de s'imaginer qu'il soit possible de tromper un vice ancré dans l'être. Que celui-ci habite si profondément la créature soumise, qu'il semble improbable que sa prisonnière puisse trouver l'énergie d'une vie parallèle.

Je t'aime donc pour tes voiles, tes faux semblants et je ne te suivrais plus là où tu n'auras plus de secrets, ou là où je serais en peine d'en trouver parce que j'aurais changé et que j'aurais rejoint l'assemblée des rieurs et des assassins. Lorsque j'aurais perdu cette sensibilité au moindre de tes gestes, au point que je croirais les avoir tous devinés par avance, comme un gros benêt, libre et fort.

Du seuil de l'appartement à la porte du taxi, tu t'es plainte d'un mauvais choix d'escarpin. Les derniers en date, d'un design apparent confortable, te blesseraient les pieds au bout de cinq minutes. Tu es remontée, il t'a attendu quinze minutes, puis s'est rendu chez vos amis sans prendre la peine d'ouvrir son smartphone, persuadé que tu avais trouvé un reste de Porto entre deux flacons de liqueur provinciale.

Je suis entré à l'heure dite, tu avais semé de pétales de rose toute l'entrée jusqu'au salon. Je me suis senti spécial cette soirée là, il y avait un vieux Hitchcock sur Youtube que tu ne voulais pas rater et nous ressemblions étrangement au couple sur l'écran qui n'arrivait pas à se retrouver, prisonniers des conventions sociales de l'époque. Nous nous sommes embrassés au premier frisson de vie coupable et je t'ai serrée dans mes bras pour une heure au moins.